tu avais presque oublié, tobi, les appels impromptus. ou tout du moins, perdu l'habitude. alors tu sursaute presque quand la sonnerie stridente du téléphone retentit dans la cuisine. sentiment d'urgence, à chaque fois, qui te prend. qui peut bien t'appeler, à cette heure-ci? qui peut bien t'appeler tout court? le silence radio de la pandémie a prit ses habitudes. et les images d'un appel passé refont surface.

cigarette violement écrasée sur le coin d'un cendrier ébreché, tu arrives dans la cuisine d'un pas pressé, pour entendre un azur tout aussi pressant à l'autre bout du fil.

u-un monstre?

ok, je sais. il aurait peut-être du se douter de la supercherie. parce que c'est azur, et qu'il devrait avoir l'habitude de ses tendances dramatiques. de son besoin d'attention immédiate. mais c'est milldren, et vraiment, est-ce qu'un monstre serait si surprenant ? on aurait vu moins crédible s'y produire ces dernières années. mais pas le temps d'en apprendre beaucoup plus. tu ne sauras pas quelle taille. quelle type. à vrai dire, tu n'es même pas certain qu'il écoute vraiment tes questions. juste, qu'il attend. et tu as mieux appris que de laisser la diva attendre.

batte de baseball fourrée dans un sac. couteau aussi. un rouleau de corde. peut-être le balais, le manche pourrait être utile? non, ça ne rentre pas. c'est les seules armes que tu trouves à proximité, que tu peux attraper assez rapidement avant de partir. celles que tu as toujours de prêtes, au cas où ils viennent pour toi, commee ils ont fini par venir pour maman. peut-être que c'est pour ça qu'il t'a appelé, toi, alors que tu sembles être la personne la moins qualifiée pour ce genre de problème. frêle et peu entraîné. sans pouvoir. pas même proche. mais tu essayes de trouver du sens dans cette situation. peut-être qu'il connait juste le numéro. oui, ça, ça serait logique, après tout.


la villa est étonament calme. étonnement ordonnée dans l'entrée pour une attaque. batte à la main, qui jure un peu avec ton col roulé et pantalon de ville, tu avances d'un pas feutré sur le sol boisé du porche.

monsieur lee?

la porte s'ouvre sur un azur essouflé, transpirant de stupeur. assez pour faire disparaître quelques doute que tu aurais pu avoir. parce qu'il le peut, après tout. il a ce talent de vous faire croire n'importe quoi. les mensonges à mi-mots, toujours sur le bord de ses lèvres. et l'émotion, qui semble si authentique, ancrée sur ses traits, mais si rarement dans la réalité. peut-être est-ce en cela que vous vous ressemblez.

ICI!

iris qui suivent son index jusqu'au plafond avec une certaine inquiétude. tu t'attends à une silhouette menaçante, une peau qui adhère au mur, un regard menaçant, mais ne trouve qu'un simple point noir, imobile, et huit petites pates qui en dépasse.

souffle coupé, prit par un retour à la réalité innatendu. évidement. langue qui vient chercher ta canine dans un réflexe de réflexion. de honte peut-être. puis un soupire rassuré alors que tu aabaisse ton arme.

ha-ha

sans émotion, vraiment. juste un regard déçu, mélangé à un peu d'aggacement. parce que t'étais inquiet, pour de vrai. aussi énervant pouvait-il être, au fond, l'acteur restait une personne que tu appréciait. ou peut-être quelqu'un. quelqu'un qui rendait ta vie moins monotone. quelqu'un qui ne te regardait pas avec un peu de pitié dans son regard. et c'était déja beaucoup.

vous me devez une cigarette. et probablement un verre pour la panique.

c'est dit sans réel soulagement. comme un fait déjà établit, pendant que tu lâche le sac dans l'espace approprié dans l'entrée. t'es prêt à t'installer, quand il t'y inviterait. puis qu'il t'y inviterait, n'est-ce pas. peut-être trop causuel pour la relation que vous entretenez. mais tu as un peu oublié tout ça depuis son dernier passage. ou peut-être parce que tu lui en veut un peu d'avoir abandonné milldren. de ne puis avoir eu cette distraction dans ton quotidien.

plus sérieusement. pourquoi je suis là. Pour de vrai.

Il dit oui. Et t’es même pas entièrement certain de si ça te surprend ou pas. Étais-ce vraiment comme ça, déjà, avant le passage de la peste? Avant l’ouverture de la porte, et la fermeture des frontière de la ville? Ça te paraît si loin. Si flou. Comme une autre vie, vraiment. Parce que tu vivais encore dans sonombre. Celle de ces pensée et terreurs. Ou tout était une menace dont tu devais te protéger. Barrière de suspicion pour toutes tes relations. C’est toujours le cas, dans une moindre mesure. T’as peut-être grandi un peu, ces dernières années. Même si le traumatisme n’est pas prêt de te quitter. Cela dit, peut-être que maintenant, t’es prêt. Prêt à essayer d’incorporer dans ta vie un peu plus que le stricte minimum.  Et peut-être qu’Azur est une possibilité pour ça, aussi fou que cela puisse paraître. Peut-être la personne la plus inaccessible de Milldren, et c’est lui que tu choisi?

Comme si c’était fait, Monsieur.

Y a quand même tes yeux qui roulent vers le ciel, quand tu t’exécute. Parce que vous êtes pas du même monde, et qu’il y aura toujours des choses que tu ne pourras jamais comprendre à son propos. Le besoin de se débarrasser d’un araignée sur le mur en faisait partie. Enfin, ça avait probablement plus de sens quand on vivait dans une villa dans les quartiers huppés quand dans ton taudis de Milldren Nord.

Les doigts qui trainent jusqu’à ta poche, en extraient un billet d’un dollar. Soigneusement, tu fais glisser la feuille verte contre le mur, chassant l’insecte jusqu’à le piéger avec l’intersection d’un meuble. Le papier passe sous ses huit petites pattes. Navette jusqu’à l’extérieur, pendant qu’il t’observe, silencieux. La courte manipulation te ferait presque oublier l’étrange délai de sa réponse. Tu ne montres, en tout cas, pas d’impatience, si ce n’est le court regard dans sa direction en refermant la porte après t’être débarrassé de la créature à quelques pas de l’entrée. Il parle enfin, t’invites à te mettre l’aise, à un certain moment.

Tu t’exécutes rapidement, ne manquant pas un mot de son plan grandiose, pendant que tu mets feu au bâton de tabac déjà posé sur tes lèvres. Tu ne rejoins le canapé avec deux verre de scotch - un pour toi, un pour lui- que quand il mentionne Gatsby. Du Azur, vraiment. Tout doit être parfait. Toi compris, appaement. Et ça t’arrache un petit hoquet amusé. Trop amusé, même, pour ne pas l’interrompre dans son énumération.

Et donc, vous avez pensé à faire appel au caissier du cinéma pour cela ?

Oserais-tu, Tobi, utiliser ce ton sarcastique ? La commissure de ta lèvre droite relevée au dessus de cette moue taquine. Il y a même un peu de défi dans la façon dont tes iris rencontrent les siennes. Parce que ce n’est pas logique. Azur-joo Lee n’a pas besoin de se contenter de toi pour organiser la fête de la décennie. Il le sait. Tu le sais. Il sait que tu le sais, et si ce n’est pas le cas, tu n’as aucunement l’intention de le laisser se méprendre. T’as beau t’être retrouvé à agir comme une sorte de domestique à son service à un moment (que tu ne saurais pas vraiment déterminer, d’ailleurs) mais tu gardes cet égo, Tobi. Celui d’un gars qui n’a peut-être aucun inspiration, mais requiert que l’on reconnaisse ses compétences.

Y a ce mélange de tous ces sentiments qui te donne cette espèce de confiance en toi, ce soir. L’agacement irrationnel de sa disparition, l’inquiétude et la déception, la pointe de honte de s’être fait avoir, la sensation d’être prit de haut. Et l’envie, au fond, de changer la donne sur votre relation, aussi, sûrement. Ça serait tout à fait logique, non, de changer de façon d’agir, pour changer la vision qu’il a de toi? Une longue trainée de fumée s’échappe de ta bouche, pendant que tes coudes prennent appuie sur tes cuisses. Basculement en avant accompagné du bruit des glaçons s’agitant dans le verre dans ta main gauche.  

Je crois vous avoir demandé une réponse sérieuse, pourtant.

La politesse qui glisse encore un peu plus loin, sans que tu ne le réalise vraiment. Sauf que cette fois, ce n’est pas vraiment voulu. Un simple rappel, penses-tu. Mais ça sonne surement un peu trop comme de la condescendance, avec ton habituelle froideur.