tout était allé si vite.
les chiffres, les mots, les papiers volant au dessus des dossiers éventrés par terre, le tableau noir écrasant tes craies blanches en tombant.

tout était allé si vite.
le paysage de San Francisco défilant à mille à l’heure dans ta course jusqu’à chez toi, chez toi où tu jettes en vrac dans un sac en bandoulière quelques vêtements, une brosse à dent, un dentifrice, une bouteille d’eau, un carnet et d’autres bricoles mais pas une photo, pas un prix, devenu une source soudaine de terreur.

tout était allé si vite.
tu arrives à la gare de San Francisco à bout de souffle ne t’arrêtant que devant une liste d’horaires et de départ des prochains trains — aucun ne passait plus par Millden donc il te fallait une alternative. un train en direction de Los Angeles partait dans moins d’une heure et tu décides de prendre un billet et d’y monter. arrivant dans la ville des Anges en pleine nuit, il t’a fallu attendre quelques heures en gare avant le premier train vers Las Vegas où tu arriveras en fin de matinée avec peu de sommeil dans la tête.

puis a commencé à ralentir.
passant ton sac en bandoulière à travers ton épaule sur ton dos, tu commences à marcher jusqu’à une route nationale, levant le pouce en l’attente d’une âme généreuse qui t’amènerait près de Millden — certains s’arrêtent mais dès que tu prononçais le nom de ta destination, beaucoup s’enfuyait. cette valse sous le soleil encore chaud du Nevada continuait un long moment avant qu’une jeune famille n’accepte de t’ouvrir la porte de leur voiture et de te déposer à quelques kilomètres de Millden. le trajet avait été assez long mais confortable, t’offrant quelques heures de sommeil en plus malgré les deux jeunes enfants qui se chamaillaient parfois dans la voiture.

on te dépose à quelques kilomètres de Millden, t’avisant tout de même de ne pas y aller vu la situation, mais tu ne leurs offre qu’un “merci” et un sourire avant de continuer ta route à pied — il te fallait maintenant arriver entrer dans une ville confinée et entourée de militaires.

puis s’est arrêté.
passant par des détours et des sentiers battus, tu arrives enfin à Millden au couché de Soleil qui donnait à toutes ces structures grises et noirs autour de la ville un air presque chaleureux. tu souffles, soulagée d’y être enfin arrivée. 11 ans que tu n’y avais pas mis les pieds et sûrement que les petites failles pour rentrer dans la ville sans passer par la porte principale n’avaient pas changés, mais maintenant elles étaient toutes gardées par des militaires très rigides.

tu restes là quelques heures, observant les mouvements des soldats, comptant les rondes et leurs intervalles - ces chiffres pourtant si commun te donnaient maintenant un mal de tête - et quand soudainement il n’y avait plus personne, tu cours jusqu’au mur essayant déjà de l’escalader — qu’ils te prennent ici ou à l’intérieur, tu t’en fichais, qu’ils te capturent, te torturent, peu importe, tant qu’ils ne te ramenaient pas à San Francisco.

@Rex Dixon